234 Fonctions et espaces de fonctions Lebesgue-intégrables.
Fonctions et espaces de fonctions Lebesgue-intégrables.
analysis
On se place dans un espace mesuré . Soit ou , que l’on munit de sa tribu borélienne .
L’intégrale de Lebesgue
Définition abstraite
Définition 1. Soit une fonction étagée positive sur . L’intégrale de sur par rapport à la mesure est définie par
Proposition 2. Soit une fonction étagée. Pour toute décomposition de la forme (où désigne une partition -mesurable finie de ), on a :
Exemple 3. Soit une fonction ne prenant qu’un nombre fini de valeurs.
On se place dans le cas où , la mesure de Dirac en un point . Alors,
On se place dans le cas où , la mesure de comptage sur . Alors,
Définition 4. Soit une fonction mesurable positive (finie ou non) sur . On pose on dit que est -intégrable si .
Propriétés
Théorème 5 (Convergence monotone). Soit une suite croissante de fonctions mesurables positives. Alors, la limite de cette suite est mesurable positive, et,
Corollaire 6. Soient , deux fonctions mesurables positives.
(l’intégrale est croissante).
(l’intégrale est additive).
(l’intégrale est positivement homogène).
Si pp., alors .
Au vu de la linéarité de l’intégrale, on peut maintenant donner la définition suivante.
Définition 7. Soit mesurable.
est dite -intégrable si est -intégrable.
Dans ce cas, si , en notant et les parties positives et négatives de , on définit
Si , en reprenant le point précédent, on définit
Proposition 8. Soit intégrable. Alors, avec égalité,
si , si est de signe constant pp.
si , si pp. pour .
Lien avec l’intégrale de Riemann
Proposition 9. Soit un intervalle de . Soit une fonction intégrable au sens de Riemann sur .
Il existe une fonction -intégrable sur telle que pp. De plus,
En particulier, si est borélienne,
Contre-exemple 10. La réciproque est fausse. Par exemple, est intégrable au sens de Lebesgue, mais pas au sens de Riemann.
Construction des espaces
L’espace vectoriel
Définition 11. On note l’ensemble des fonctions -intégrables. En l’absence d’ambiguïté, on notera simplement ou . Cette définition s’étend aux ensembles de fonctions intégrables à valeurs dans , , etc.
Exemple 12. Si est la mesure de comptage sur , alors
Théorème 13.
est une forme linéaire positive (au sens où ) et croissante sur .
est un espace vectoriel sur .
est une semi-norme sur .
Théorème 14 (Lemme de Fatou). Soit une suite de fonctions mesurables positives. Alors,
Exemple 15. Soit croissante sur , continue en et dérivable en et dérivable pp. dans . Alors,
Théorème 16 (Convergence dominée). Soit une suite d’éléments de telle que :
pp. en , converge dans vers .
positive telle que Alors,
Exemple 17.
On reprend l’Exemple 15 et on suppose partout dérivable sur de dérivée bornée. Alors l’inégalité est une égalité.
Soit . On pose . Alors,
Application 18 (Lemme de Borel-Cantelli). Soit une famille de parties de . Alors,
Les espaces vectoriels
Définition 19. Pour tout réel , on définit on a les mêmes remarques qu’à la Définition 11.
Proposition 20. est un espace vectoriel.
Proposition 21.
Si , alors
Si est la mesure de comptage sur , alors
Définition 22. Pour tout , on définit
Théorème 23 (Inégalité de Hölder). Soient tels que , et . Alors et
Théorème 24 (Inégalité de Minkowski).
Les espaces vectoriels normés
Définition 25. On définit pour tout , où .
Théorème 26. Pour tout , est un espace vectoriel normé.
Théorème 27 (Riesz-Fischer). Pour tout , est complet pour la norme .
Théorème 28. Soit une suite d’éléments de qui converge vers pour la norme . Alors, il existe une sous-suite de qui converge pp. vers .
Proposition 29. Pour tout , l’ensemble des fonctions étagées intégrables est dense dans .
Théorème 30. On se place sur . Alors :
L’ensemble des fonctions en escalier à support compact est dense dans pour tout .
L’ensemble des fonctions continues à support compact est dense dans pour tout .
L’espace
Définition 31.
Soit . On définit comme le supremum essentiel de la fonction et (noté en l’absence d’ambiguïté) l’ensemble des fonctions -essentiellement bornées.
On définit où .
Théorème 32. , muni de , est un espace vectoriel normé complet.
Remarque 33. L’inégalité de Hölder est encore vraie pour .
Grands théorèmes d’intégration
Régularité sous l’intégrale
Soit où est un espace métrique. On pose .
Continuité
Théorème 34 (Continuité sous le signe intégral). On suppose :
, est mesurable.
pp. en , est continue en .
positive telle que
Alors est continue en .
Corollaire 35. On suppose :
, est mesurable.
pp. en , est continue sur .
positive telle que
Alors est continue sur .
Exemple 36. La fonction est bien définie et continue sur .
Exemple 37. Soit intégrable. Alors, est bien définie et est continue sur .
Dérivabilité
On suppose ici que est un intervalle ouvert de .
Théorème 38 (Dérivation sous le signe intégral). On suppose :
, .
pp. en , est dérivable sur . On notera cette dérivée définie presque partout.
compact, positive telle que
Alors , et est dérivable sur avec
Remarque 39.
Si dans le Théorème 38, hypothèse (i), on remplace
dérivable
par, alors la fonction est de classe .
On a un résultat analogue pour les dérivées d’ordre supérieur.
Théorème 40 (-ième dérivée sous le signe intégral). On suppose :
, .
pp. en , . On notera la -ième dérivée définie presque partout pour .
, compact, positive telle que
Alors , , et avec
Exemple 41. La fonction de l’Exemple 36 est sur .
Exemple 42. On se place dans l’espace mesuré et on considère une suite de fonctions dérivables sur telle que Alors est dérivable sur de dérivée .
Application 43 (Transformée de Fourier d’une Gaussienne). En résolvant une équation différentielle linéaire, on a
Application 44 (Intégrale de Dirichlet). On pose , alors :
est bien définie et est continue sur .
est dérivable sur et , .
.
Holomorphie
On suppose ici que est un ouvert de .
Théorème 45 (Holomorphie sous le signe intégral). On suppose :
, .
pp. en , est holomorphe dans . On notera cette dérivée définie presque partout.
compact, positive telle que
Alors est holomorphe dans avec
Exemple 46. La fonction de l’Exemple 36 est holomorphe dans l’ouvert .
Intégration sur un espace produit
Théorème 47 (Fubini-Tonelli). Soient un autre espace mesuré et . On suppose et -finies. Alors :
et sont mesurables.
Dans ,
Théorème 48 (Fubini-Lebesgue). Soient un autre espace mesuré et . Alors :
Pour tout , et pour tout , sont intégrables.
et sont intégrables, les fonctions étant définies pp.
On a :
Contre-exemple 49. On considère . Alors, , mais .
Exemple 50. Soient et . Alors,
L’espace
Aspect hilbertien
Définition 51. L’application définit un produit scalaire hermitien sur . Muni de ce produit scalaire précédent, est un espace de Hilbert.
Conséquences
Théorème 52 (Projection orthogonale). Soit un sous-espace vectoriel fermé de . Alors,
Corollaire 53 (Théorème de représentation de Riesz). Soit une forme linéaire continue. Alors,
dual-de-lp
Application 54 (Dual de ). Soit un espace mesuré de mesure finie. On note , . L’application est une isométrie linéaire surjective. C’est donc un isomorphisme isométrique.
Remarque 55. Plus généralement, si l’on identifie et :
est le dual topologique de pour .
est le dual topologique de si est -finie.
Base hilbertienne de
Soit un intervalle de . On pose , .
Définition 56. On appelle fonction poids une fonction mesurable, positive et telle que .
Soit une fonction poids.
Notation 57. On note l’espace des fonctions de carré intégrable pour la mesure de densité par rapport à la mesure de Lebesgue.
Proposition 58. Muni de est un espace de Hilbert.
Théorème 59. Il existe une unique famille de polynômes unitaires orthogonaux deux-à-deux telle que pour tout entier . C’est la famille de polynômes orthogonaux associée à sur .
Exemple 60 (Polynômes de Hermite). Si , alors
Lemme 61. On suppose que , et on considère la famille des polynômes orthogonaux associée à sur . Alors , . En particulier, l’algorithme de Gram-Schmidt a bien du sens et est bien définie.
densite-des-polygones-orthogonaux
Application 62. On considère la famille des polynômes orthogonaux associée à sur et on suppose qu’il existe tel que alors est une base hilbertienne de pour la norme .
Contre-exemple 63. On considère, sur , la fonction poids . Alors, la famille des n’est pas totale. La famille des polynômes orthogonaux associée à ce poids particulier n’est donc pas totale non plus : ce n’est pas une base hilbertienne.
Application aux séries de Fourier
Notation 64.
Pour tout , on note l’espace des fonctions , -périodiques et mesurables, telles que .
Pour tout , on note la fonction -périodique définie pour tout par .
Proposition 65. est un espace de Hilbert pour le produit scalaire
Théorème 66. La famille est une base hilbertienne de .
Corollaire 67 (Égalité de Parseval).
Exemple 68. On considère sur . Alors,
Remarque 69. L’égalité du Corollaire 67 est valable dans , elle signifie donc que